Le cou tendu, la nuque nouée par les rotations interrogatives,
Tu observes le regard creusé par tes sourcils tricotés en une expression désarçonnée. On t’as dit qu’il y avait dans les musées l’essence même de l’humanité, des bribes importantes du passé, des formes et des couleurs qui seraient nécessaires à construire ta nouvelle identité.
Et pourtant,
Tu es allée et venue,
Tu as piétiné devant les toiles,
Tournoyé autour des sculptures.
Tu ne saurais recracher ce que l’on a tenté de t’administrer, te transmettre à travers tous ces corps souvent dénudés bien que ton œil compulsif se soit arrêté face aux tissus et broderies peinturlurées. Comme une forme de daltonisme, ou bien davantage un entêtement sévère à ne remarquer que ce que l’on désire voir, une drôle d’imperméabilité à la nouveauté.
Qu’ils sont étranges,
Avec leurs corps et leurs attributs.
Qu’ils paraissent petits, foudroyés,
Par ce grand mot qu’est l’humanité.
Quelle jolie soie rose poudrée.
Et tu notes,
Furieusement, avec la diligence d’un apprentie contrarié, navré, dans ton petit carnet dont les pages commencent à gondoler. C’est lorsque l’ennuie insolent te frappes que tu décides de t’en aller, il faut croire que tu en as eu assez. Pourtant sur ton chemin, une silhouette cyclopéenne se dresse et si sa taille te semble impressionnante malgré les volumes du lieu, c’est ce qu’il dégage qui te fais le regarder.
Comme pavé de bonnes intentions,
Une grande intensité zigzaguant dans sa posture,
Un je-ne-sais-quoi qui rappelle entre-autre la maison.
Et sans savoir pourquoi,
Peut-être le badge qui pendouille,
Ou bien l’aspect académique de sa personne,
Tes premiers sonnent comme une plainte.
« Je m’excuse mais si ça peut vous rassurer je n’ai pas touché ! Et entre ton index et ton pouce, tu mimes la distance rétrécie, un sourire faussement embarrassé aux lèvres, dont les commissures révèlent une exaspération légère, J’ai juste regardé de très très prêt…! »
Car tu as appris à tes dépends que ton index moite sur les œuvres,
Était considéré comme un outrage, un ravage.